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Martla

De premier abord, Martla a l'air d'un homme un peu rugueux, gauche, un peu sauvage.

Il se présente la première fois en un seul mot et hôche simplement la tête quand on lui pose des questions. Il parle peu. On ne sait pas trop si on va rigoler avec lui ou pas, alors on attend de voir.

 

Costaud, charpenté, Martla est assez grand. Il a le regard sombre, les cheveux noirs et le teint mât de son pays. De grosses mains caleuses dont on sent qu'elles ont rudement travaillé.

 

Peu à peu, Martla se laisse découvrir. À presque la quarantaine, l'homme a conservé son sourire de gamin, qui fend en large tout son visage quand il fait fumer un lézard et qu'il se marre. Il est bien souvent de bonne humeur. Il chante tout en conduisant et nous observe avec en coin le regard malicieux du bambin qui aime bien faire des bêtises. Il s'esclaffe de rire devant nos mines d'ahuris quand nous ne comprenons rien à ce qu'il dit – il faut dire aussi que Martla ne parle pas un mot d'anglais. Mais on sent bien que, si cela avait été le cas, le potentiel de bêtises à l'intérieur de notre van aurait été fortement et dangereusement multiplié.

Martla est intelligent. Il connaît son pays par cœur, se dirige on ne sait comment parmi les multiples pistes de terre, sillonant les montagnes et filant sous les étoiles. Il vous démonte un camion entier et vous le refait à neuf en moins d'une journée. Calme, efficace et d'une patience à tout épreuve, être arrêté au beau milieu du désert sous une chaleur de plomb et devoir mettre les mains dans le cambouis n'est pour lui qu'une question d'habitude : cela fait partie du jeu, et il se met à la tâche sans inquiétude

Mais, s'il peut se targuer d'être un mécanicien hors pair, Martla conduit par contre comme un âne !!! Imaginez un pilote de rallye aux manettes d'un vieux van russe déglingué sur des pistes creusées et truffées d'embûches de toute sorte … Le coup de volant est énergique, sportif, brusque, et pourtant assuré – un vrai phénomène !

 

Au fil des kilomètres avalés par les roues solides de son van, même si les gestes et les regards complices suffisent pour exprimer l'essentiel, Martla est frustré de ne pas pouvoir nous comprendre, et de ne pas connaître l'anglais pour pouvoir échanger avec nous. Ce sont là les rares signes de son agacement, quand il désire vraiment nous transmettre quelque chose mais que la barrière de la langue se fait cette fois-ci trop dure à escalader.

Martla a deux filles qui portent en mongol le nom de la Lune. Il vit dans la campagne à l'ouest d'Ulaanbaatar, et on sent bien quand il traverse les rues de la capitale que ses artères agitéees et poussiéreuses ne sont pas son élément.

Martla est d'une générosité humble qui fait la beauté de son pays : un vrai grand gentil dans un corps de costaud ...

 

Regards sur les enfants de l'orphelinat

Pierre-Martin

 

Pierre-Martin est tout petit. C'est la première chose qui vient à l'esprit quand on le regarde. Un petit garçon tout menu, tout frêle, léger comme une plume de moineau.

Agile comme un petit singe, il vous grimpe dessus, sur les bras, sur le dos, et pourtant vous ne sentez rien d'autre que ses petites mains qui vous aggripent – pas le moindre kilo.

Pourtant, Pierre-Martin a six ans. On a du mal à le croire, car il en fait facilement trois de moins. Il parle peu, et il est bien rare d'entendre sa petite voix fluette et discrète.

Pierre-Martin ne sent pas très bon. Il se lave peu, ses ongles sont noirs et et ses vêtements sales, couverts de terre et de poussière à force de se frotter aux surfaces rugueuses du dehors.

Pierre-Martin est le plus jeune de l'orphelinat - c'est ce qui le sauve un peu. Les filles s'occupent de lui et l'ont pris sous leur aile.

Heureusement, car on sent bien que Pierre-Martin est perturbé. Parfois, il s'agite et crie tout seul, sans raison. Ou alors il trépigne sans que l'on comprenne pourquoi.

Il suffit alors de prendre Pierre-Martin contre soi et de le serrer très fort. Alors on entend s'élever comme une corolle au-dessus des nuages le rire le plus clair et lumineux que les cieux aient jamais entendu ...

 

Marie-Faustine

 

Marie-Faustine a une bouille toute ronde, et des yeux tout petits qui se cachent à l'intérieur. Futée et énergique, la jolie est une petite tricheuse qui, rapide, peut vous mener en bateau et vous gagner au jeu à chaque fois. Le regard étonné, elle cherche discrètement à vous comprendre et, un peu perdue, balance entre le besoin de venir se blottir dans vos bras et le rejet d'une culture qui, définitivement, n'est pas non plus la sienne …

 

Dieudonné

 

Dieudonné est le plus grand de tous. Costaud, musclé, il a bientôt l'allure d'un jeune homme.

Et pourtant, Dieudonné reste un enfant. Il triche sur son âge pour se faire paraître plus grand.

Il dit qu'il a seize ans. Il en a treize.

Avec sa carrure de grand gars un peu pataud, Dieudonné est le plus âgé, et veille bien malgré lui sur cette cohorte de gamins agités et un peu perdus ...

 

 

 

 

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